Sélections équipe de France Slalom 2021, le témoignage des athlètes

- Catégories : canoë kayak slalom
Pol Oulhen finale pige 2 vaires-sur-marne

Il y a quelques jours se clôturait la course française la plus célèbre et la plus angoissante de l’année en slalom. Les meilleurs pagayeurs nationaux s’y affrontent de façon impitoyable pour espérer franchir les portes du circuit international.

Si la règle paraît simple, il faut être dans les 3 meilleurs de sa catégorie pour se sélectionner, la réalité est beaucoup plus cruelle. Durant cet évènement le meilleur comme le pire est à prévoir, des outsiders qui font surface dans la cour des grands, et des géants qui s’effondrent. Personne n’est épargné, il faut être excellent et ce, 3 jours durant. 

Les sélections pour l’équipe de France 2021 ont eu lieu à Vaires-sur-Marne, du 22 au 25 avril, sur le bassin qui abritera les futurs JO de Paris. C’était la première compétition organisée sur le site, malgré la crise sanitaire. L’évènement s’est donc tenu grâce à un protocole strict, pas de public, port du masque obligatoire en dehors du bateau, et le respect des gestes barrières. 

Le tout récent stade nautique de Vaires a mis fin à une décennie d’organisation des piges sur les bassins de Pau et Seu. Bien que la carrure de celui-ci laisse à désirer de par son importante exposition au vent, un dénivelé faible, des zones de plats qui piquent les bras ; l’exigence des parcours tracés par les entraîneurs ont donné du fil à retordre à nos athlètes français.

Pour le plus grand plaisir de tous, Dollo a interrogé la crème de la crème, ces compétiteurs d’un autre monde qui n'hésitent pas à sacrifier toute leur vie dans la quête de performance. Vous voulez savoir ce que ces sportifs de haut niveau avaient dans la tête durant cet évènement décisif, vous allez être servi ! Voici les témoignages d’Anatole Delassus, Marjorie Delassus, Denis Gargaud Chanut (Team Vajda), Romane Prigent, Pol Oulhen et Luc Sarramea.

Anatole delassus demi-finale piges 3

DOLLO - Qu'as-tu pensé globalement de l'organisation de ces sélections sur le nouveau bassin olympique de Vaires-sur-Marne ?

ANATOLE - Je suis vraiment content d'avoir participé à cette semaine intense de compétition. J'ai vraiment le sentiment d'être aller puiser des ressources au fond de moi. 

MARJORIE - Je suis contente que les piges aient eu lieu, ça fait du bien de prendre des départs, j’espère que la suite du circuit international sera maintenue, avec du public au bord des bassins pour nous encourager.

DENIS - J’étais franchement très pessimiste sur la tenue des sélections après le discours du président et l’instauration du troisième confinement. Je dois t’avouer que ça m’a mis un sacré coup au moral ! J’avais plutôt bien surmonté les deux premiers confinements, mais là j'ai vraiment pris une claque ! L’incertitude m’a sapé le moral et je me disais que c’était plus le sport que j’aimais pendant des années, là ça devenait trop naze ! Bref le moral est vite revenu et j’étais content de courir malgré les restrictions.

L’organisation s’est plutôt bien passée je trouve. On a eu de la chance avec le beau temps mais comme prévu on a eu du vent. Pendant les deux premières courses, les portes n’ont pas trop bougé, ce qui était un bon point. Le troisième jour c’était limite pour les demi, et vraiment « border line » pour les finales. J’ai dû jouer avec les éléments pendant ma manche, ce n'était pas l’idéal !

ROMANE - C’est assez spécial de courir pour la première fois ces courses sur le bassin de Vaires, mais les parcours peuvent être très intéressants et variés.

POL - Alors pour moi ces piges étaient un événement particulier ! D'un côté on a découvert de manière inédite un nouveau site qui sera central dans ces prochaines années ; d'un autre côté le contexte ne nous a pas permis d'être dans la célébration de l'événement (pas de spectateurs et une ambiance particulière). D'un point de vue sportif, il me semble que la compétition était belle, il n'y avait pas de leaders absolus, même si certains ont dominé, on avait la sensation que tout le monde pouvait décrocher un ticket pour l'équipe, et je trouve que ça rendait la course plus belle.

DOLLO - Qu’est-ce que tu as le plus aimé pendant ces sélections ?

ANATOLE - Un point que j'ai vraiment apprécié durant ces piges était la variété et la difficulté des trois parcours qui nous ont été proposés. Je trouve que les traceurs ont réussi à faire des parcours à la fois exigeants et plaisants. Je pense que c'est un très bon entrainement pour les athlètes sélectionnés qui vont se lancer dans une saison internationale où les parcours ont souvent l'air très difficile. Puis j’ai assisté à du beau spectacle dans chaque catégorie, ce qui était vraiment cool ! 

MARJORIE - Réussir à produire de la belle navigation, j’étais focus sur des points clés et le projet qui a été mis en place. Je suis rentrée dans mes courses correctement malgré quelques erreurs. Finalement, il y avait de la vitesse et le résultat à la ligne d’arrivée ! 

DENIS - Mon état d’esprit, je voulais gagner ! Ça peut paraître bizarre, mais ça fait un moment que je n’avais pas ressenti ça ! 

ROMANE - Réussir à sortir une deuxième partie de manche à mon niveau sur la 3ème finale après un départ bancal, et gagner cette manche.

POL - J'ai aimé la compétition qu'il y avait ! Même si c'était un peu frustrant de ne pas me sentir à 100%, j'ai eu plaisir à penser que je pourrais m'inclure dans cette belle dynamique !

LUC - Faire une compétition avec de l'enjeu, ça fait vraiment plaisir en cette période !

DOLLO - Qu’est-ce que tu as le moins aimé ?

ANATOLE - les possibles erreurs de jugement que moi-même et d’autres ont cru voir au cours de la semaine. Je sais que certains peuvent me prendre pour un mauvais perdant ou un rageux, mais ce n’est pas le cas, j'accepte le résultat final et la sélection de ceux qui l’ont décroché. Les meilleurs ont gagné et bravo à eux ! Cependant je pense qu'il serait intéressant d'innover et d'investir dans un système de jugement plus performant et qui ne laisserait aucune place au doute. On est en 2021 et on peut faire des choses incroyables avec la technologie. Je ne suis pas ingénieur, mais je suis sûr qu'il y a matière à améliorer notre sport, mettre une caméra à 360° sur chaque porte peut-être...Ou peut-être que je devrais simplement passer plus au milieu de mes portes..[rire]

MARJORIE - La météo, les conditions de la course 3 laissaient à désirer avec des rafales aléatoires entre chaque compétiteur, mais bon c’est le risque du sport de plein air.

DENIS - J’ai trouvé qu’il y avait beaucoup de réclamations, c'est un sentiment que j’ai eu. Ce n’est pas le plus beau des spectacles, mais c’est le jeu. Ça tend un peu l’atmosphère.

ROMANE - Mes sensations lors de la deuxième course, quelques doutes sur le parcours qui ne m’ont pas permis de m’exprimer comme je le souhaitais.

POL - Mon petit bémol pourrait venir de l'ambiance forcément. Je pense que l'environnement de la course est important et exacerbe les rivalités sportives (même si on n'est pas habitué aux tribunes remplies, on aime qu'il y ait un engouement je crois !) Et là on avait moins ce plaisir forcément ! Tout le monde faisait gaffe (et c'est normal dans ce contexte, il est bon de le rappeler).

DOLLO - Quel bilan tires-tu de cet évènement déterminant ?

ANATOLE - Le mélange d'excitation et de stress qui ne m’a pas quitté durant 5 jours est une chose difficile à gérer, et je pense avoir beaucoup appris sur moi même et mon mental. Sur la navigation, je suis plutôt content de ce que j'ai pu produire, je me suis prouvé que j'avais la vitesse, mais il va falloir maintenant que je réussisse à la réguler et à ne pas tout le temps être "à fond" pour ne pas partir à la faute. 

MARJORIE - Ce n’était pas une échéance principale pour moi, mais une course d'entraînement pour effectuer quelques réglages avant les JO, ce que j’ai plutôt bien réussi. C’est donc un bilan positif avec notamment beaucoup de plaisir d’être sur l’eau. 

ROMANE - Assez satisfaite de mes courses, le résultat est celui que j’espérais. Je sais que je peux aller plus vite que ce que j’ai produit en terme de vitesse de navigation sans le stress particulier des piges. Je me tourne vite vers les prochaines compétitions internationales.

POL - J'ai hâte de prendre un nouveau départ, et que tant qu'il y aura du monde à se tirer la bourre pour exploser des manches, je serai ravi d'essayer d'y prendre part !

LUC - Pour moi les piges ont été compliquées, je n'ai pas vraiment réussi à m'exprimer. Les performances que j'ai pu produire pendant la semaine sont bien en dessous de ce que j'espérais pouvoir faire. J'en tire de l'expérience et ça me donne beaucoup de pistes de travail !

DOLLO - Denis, tu es passé à côté de la première course, tu prends une pénalité le deuxième jour qui te relègue à la 3ème place, tu n’avais donc plus le choix sur la 3ème course, il fallait gagner ! Dans quel état d’esprit étais-tu ?

DENIS - Mon état d’esprit était de courir pour la gagne, et oui en effet à l’échauffement ou pendant la nuit, plusieurs fois je me suis dit : ça ne sert à rien de faire perdre du temps aux gens qui m’accompagnent, et moi je ne veux pas être le vieux qui s’accroche à une longue carrière ; donc si ça ne veut pas sourire, on passera à autre chose.

Ce qui m’a surpris le plus, c’est que je n’avais pas peur de ça, j’étais en paix avec ce constat. Soit ça repart, soit ça s’arrête. Et comme il y avait un aspect scénario que je ne pouvais pas gérer, je me suis dit vraiment, fais ton truc et si ça marche c’est le destin qui te donne une dernière chance. Du coup je vais essayer de ne pas la gâcher  🙏🏻  🙏🏻 

Luc Sarramea sélections équipe de france 2021

Nous pouvons conclure que cette semaine a été intense en émotions avec beaucoup de rebondissements, comme la sélection in-extremis de Denis Gargaud sur sa toute dernière manche, ou encore celle de Benjamin Renia qui échouait en finale B le premier jour des sélections et réalise un come-back serré lors de la course 2 et 3, venant décrocher sa seconde sélection en équipe de France sénior derrière le nouveau champion de France Mathieu Biazizzo.

Chez les C1 dames c’est Angel Hug qui sort les crocs lors de la course 3 pour obtenir le dernier ticket en équipe de France derrière la brillante Lucie Prioux.

En K1 dames, la famille Prigent a dominé les sélections. Camille s'est imposée lors des deux premières courses avec une bonne marge d'avance, et sa cousine Romane, à ses talons, a remporté la dernière manche, ne laissant aucune chance à ses concurrentes.

Et en C1 hommes, Nicolas Gestin a montré qu'il était on ne peut plus solide tout au long de la semaine en prenant place sur tous les podiums, même si le champion du monde Cédric Joly aurait pu lui faire peur en remportant la première course, le jeune sociétaire du club de Quimperlé ne s'est pas décontenancé et a validé sa première sélection chez les séniors. Comme quoi rien n’est jamais joué, tout est possible jusqu’à la dernière seconde !

Retrouvez la composition de l’équipe de France slalom 2021

K1D : Marie-Zélia Lafont (sélectionnée olympique), Camille Prigent, Romane Prigent.

C1D : Marjorie Delassus (sélectionnée olympique), Lucie Prioux, Angel Hug.

K1H : Boris Neveu (sélectionné olympique), Mathieu Biazizzo, Benjamin Renia.

C1H : Martin Thomas (sélectionné olympique), Denis Gargaud Chanut, Nicolas Gestin.

Nous aurons à cœur de suivre ces athlètes lors la saison internationale, à commencer par les championnats d’Europe à Ivréa du 6 au 9 mai. Il y aura ensuite deux coupes du monde à Prague et Markkleerberg, avant la tenue des JO de Tokyo fin juillet. L’avant dernière étape de la coupe du monde à Seu D’Urgell sera réservée à la catégorie des -23 ans et à l’équipe olympique. La finale se jouera en terre française à Pau, alors préparez votre maquillage tricolore et la vuvuzela pour encourager nos français ! Enfin se tiendront à la fin du mois de septembre les championnats du monde sur le nouveau bassin de Bratislava, actuellement en cours de rénovation. Une nouvelle pépite internationale, nous l'espérons ! 

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